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14 janvier 2013 1 14 /01 /janvier /2013 08:50

Dans les premiers instants où le regard redécouvre un tableau de Poliakoff, il y a une émotion de géologue ou de géographe surpris par des masses de mondes séparés et cependant reliés par la parenté tonale des couleurs – toutes déclinant des rouges et des bruns, et jusqu'à l'essence d'une aurore profonde qui est “idée de brun”, ou “idée de rouge”, lieu d'une fournaise imaginaire où elles furent toutes fondues; ou bien “idée de gris” comme des neiges en plaques, ces zones grisées qui s'associent et s'entassent les unes à côté des autres; ou bien “idée de bleu” qui se décompose toute en nuances , et cependant les juxtapose, les fait frémir complices et lointaines à la fois, par leurs affinités et leurs distances qui semblent relever d'un savoir d'alchimiste. Sans doute le moment viendra d'explorer les si fascinantes surfaces de couleurs maçonnées, qui sont des grès, des coupes de marbres clivés, des fonds de marbres un peu brut travaillés, portant les traces du couteau ou de la brosse comme les traces du ciseau de sculpteur – qui donnent une densité irréelle de matière brute dans ces assemblages de teintes subtiles et concertantes. Dans ces tableaux où les éléments sont si solidement associés, ce qui fascine, ce qui donne une surprise qui “décompose” l'attention, déconcerte et par là même élève l'intellignce des couleurs et nous laisse dans un premier temps démunis, c'est l'apparent éclatement des parties réunies, et tout en même temps leur absolue nécessité formelle – derrière tout tableau qu'on croit voir, il y en a peut-être un autre plus profond, celui vers quoi tendaient l'idéal et la pensée, et c'est celui qui donne l'idée sublime d'un monde retrouvé. Même si certaines toiles paraissent plus “statiques”, et si d'autres préparent à tel ou “envol” ou quelque parcours au dessin plus lyrique, c'est toujours par un saisissement absolu qu'elles exercent pour nous leur “mouvement”, le mystère de leur infinie complexité de zones de couleurs exerçant une tension persistante.

 

 

Variation sur le grand peintre par l'amateur des Lacs Italiens, toujours parcourant les terres de Stendhalie -- elevergois.com (eric levergeois)

 

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